Comment les médias européens ou la Russie exploitent-ils l’opinion publique occidentale ?
Les médias européens, les agences de presse influentes, les sites Web et les chaînes de télévision ont été influencés, sans s’en rendre compte, par la désinformation diffusée par le réseau d’information privé de Vladimir Poutine. Ce qui les a poussés à faire cela est très mystérieux, mais le fait demeure. Le géant d’information russe, Sputnik, qui dispose d’un réseau de bureaux locaux dans plus de 30 pays et d’un réseau d’information adapté pour présenter la politique russe dans ces différents pays, fournit une désinformation à la presse européenne traditionnelle, et cette dernière l’accepte volontiers. Le projet « Sputnik » a été lancé en novembre 2014 et des bureaux locaux ont été créés dans de nombreux pays du monde. Dans les pays où ils ouvrent des bureaux locaux, ils jouent le rôle d’un centre multimédia combinant des stations de radio, des sites Web et des agences de presse qui fournissent des services d’information aux publics locaux. Le siège, bien sûr, est situé à Moscou. Sputnik a des bureaux locaux aux États-Unis, en Égypte, en Chine, au Royaume-Uni, en France, au Kirghizistan, en Azerbaïdjan, en Arménie et même en Uruguay.
Il s’agit d’un réseau multimédia appartenant à Russia Today Media Holding (qui a un budget de 500 millions de dollars), dirigé par Margarita Simonian et son mari Tigran Keosayan. Ce n’est un secret pour personne que dans de nombreux pays occidentaux, le service d’information de Sputnik est jugé tendu et biaisé, et c’est certainement le cas. Sputnik, qui présente des informations locales insignifiantes selon l’agenda du pays hôte, détermine sa principale politique d’information en fonction des intérêts de la Russie. C’est pourquoi, seulement cinq ans après sa fondation, en mai 2019, le président russe Vladimir Poutine a décerné à Simonian l’Ordre d’Alexandre Nevski, la plus haute distinction d’État de Russie. En acceptant cet ordre, Margarita Simonian s’est tenue comme un soldat et l’a remercié avec les mots « Je sers la Russie ». (L’expression « Je sers la Russie » comme la réponse est la norme de la Charte des militaires récompensés de l’armée russe).
Fait intéressant, l’un des dirigeants de l’opposition russe, Alexeï Navalny, a récemment publié un rapport complet sur les pratiques de corruption de Margarita Simonian liées aux fonds budgétaires des projets médiatiques.
Pourquoi je parle du projet Sputnik ? Parce qu’il y a des mythes repris par la presse européenne et présentés à l’opinion publique en Europe, et il est nécessaire de prouver à quel point ces mythes sont sans fondement. En particulier, dans le contexte et au cours du conflit Azerbaïdjan-Arménie. Il est également intéressant de noter que, contrairement au gouvernement russe, qui semble neutre dans l’opération militaire actuelle, toute la presse russe et, aussi étrange que cela puisse paraître, le Premier ministre Nicole Pashinyan lui-même utilise les « arguments » de Sputnik. Malgré le fait que Margarita Simonian, une citoyenne russe d’origine arménienne, s’est également adressée aux dirigeants arméniens avec la rhétorique officielle de la Russie, les accusant de trahir les intérêts de la Russie. Lors de la dernière confrontation, elle a tweeté que « dans les couloirs de Moscou, il y a des rumeurs selon lesquelles l’Arménie va devoir soit retourner vers la Russie, soit retourner vers la Russie. »
Quant à l’Azerbaïdjan, il y a des mythes inventés par la politique d’information de Madame Simonian et transmis aux médias occidentaux. Quels sont ces mythes ?
1. « L’Azerbaïdjan a fait venir des mercenaires, des combattants religieux radicaux de Syrie et ils participent à des opérations militaires. »
Les djihadistes religieux radicaux qui combattent en Syrie n’ont pas réussi à gagner une victoire quelconque à travers d’un processus réussi. Ils se sont soit dispersés, soit se retrouvent dans des groupes de guérilla semi-secrets dans les buissons du Moyen-Orient dans des groupes marginaux séparés. Leur condition morale et psychologique n’est pas suffisante pour participer aux opérations militaires. Même le pire gouvernement, avec sa pire armée, ne les recrutera pas comme combattants. L’implication de combattants, qui n’ont pas de discipline militaire et n’ont pas la possibilité d’insuffler un optimisme moral à l’armée, dans des opérations militaires ne peut que causer du tort. Par conséquent, l’Azerbaïdjan ne peut pas avoir besoin de leurs services. Des opérations de combat ont été lancées en Azerbaïdjan pour garantir l’intégrité territoriale. Indépendamment des intérêts des gouvernements dans le déclenchement de ce conflit militaire, les gens considèrent ces opérations comme une guerre patriotique et rejoignent l’armée volontairement en grands groupes. Il n’y a pas besoin de mercenaires. De plus, 100 à 200 Azerbaïdjanais qui sont allés combattre en Syrie à l’époque faisaient partie de ceux qui ne sont pas revenus, ou sont revenus et ont été emprisonnés pendant une longue période (la participation à des formations militaires illégales est punie par le code pénal en Azerbaïdjan). Faire venir en Azerbaïdjan des islamistes radicaux qui ont pris part à des opérations militaires en Syrie et au Moyen-Orient serait moralement et psychologiquement incompatible avec l’armée azerbaïdjanaise, créerait le chaos dans les opérations militaires et l’inconfort des unités militaires.
2. Par ailleurs, une expression qui circule dans la presse occidentale doit être considérée comme une continuation de ces mythes.
Il s’agit de l’expression « les Azerbaïdjanais musulmans, les Arméniens chrétiens ».
Bien sûr, pendant une guerre, il y a certains critères qui distinguent les parties. Ce sont des différences religieuses, ethniques et politiques, etc. L’expression « Azerbaïdjanais et Arméniens » est elle-même une description de la différence, et présenter cette différence comme « musulmans et chrétiens » devrait être considérée comme une tentative d’inculquer de la sympathie et de l’antipathie. L’Azerbaïdjan n’est pas un État religieux. Le régime en Azerbaïdjan est autoritaire, corrompu, kleptocratique, mais pas clérical. Quelle que soit l’expression négative que vous utilisez à propos du régime en Azerbaïdjan, elle peut être appropriée, mais leur attitude à l’égard de l’Islam n’est pas différente de l’attitude de tout Français, Allemand, Américain, Anglais ou athée envers l’Islam. La plupart des gens se considèrent comme des « musulmans hérités ». La société azerbaïdjanaise n’est en retard ni sur la société arménienne ni sur la société géorgienne en matière de consommation d’alcool. C’est une société purement laïque, il y a aussi des croyants, et leur pourcentage n’est pas supérieur au pourcentage de la section religieuse en France ou dans d’autres pays chrétiens. Par conséquent, l’expression « Azerbaïdjanais musulmans et arméniens chrétiens » est simplement utilisée pour évoquer le fanatisme dans l’opinion publique de l’Occident chrétien, et l’Azerbaïdjan n’a pas de perspectives de menacer le monde ou la région en raison d’idées religieuses radicales.
3. « L’armée turque se bat du côté Azerbaïdjanais. »
Quelle que soit la complexité de la guerre, c’est un processus de discipline. Il y a des morts et des blessés des deux côtés. Dans de nombreux cas, les corps des morts restent du côté de l’ennemi. Jusqu’à présent, aucun citoyen turc n’a été tué dans l’armée azerbaïdjanaise.
Même en Azerbaïdjan, où des sérieux problèmes de la liberté d’expression existent, la prolifération actuelle des réseaux sociaux révèle des informations que le gouvernement veut garder secrets… Vous ne trouverez aucune information concernant la présence de l’armée turque en Azerbaïdjan sur les réseaux sociaux. En outre, l’Azerbaïdjan est un pays ouvert. L’un des principaux domaines laissés ouverts par le gouvernement local, qui est en proie à la corruption depuis de nombreuses années, est la sécurité nationale. Par conséquent, en Azerbaïdjan, dans tous les domaines, de l’armée au secteur agricole, les services spéciaux de divers pays, en particulier ceux qui s’intéressent à la région, disposent de ressources pour obtenir des informations dont ils ont besoin. Les services spéciaux de l’Iran ont également un grand accès à l’information. Il y a à peine deux ans, une centaine de militaires ont été arrêtés en Azerbaïdjan pour espionnage pour les services spéciaux arméniens. S’il y avait un seul fait confirmant la présence de l’armée turque ou d’éventuels mercenaires dans les unités combattantes, cette information ne pouvait pas être tenue secrète.
Je parle de ces clichés parce que même la presse française, qui a une grande tradition de démocratie, évite les analyses objectives de manière non professionnelle. Ce dernier n’est pas une bonne tradition, et c’est une exigence professionnelle de se conformer aux normes des valeurs que vous représentez en la rejetant.
Ganimat Zahid
Rédacteur en chef du journal Azadlig
Directeur général de Turan TV